Comme lors d’une écoute du tube « Alle kleuren » de l’excellent groupe flamand K3, le peloton BCF en aura vu de toutes les couleurs, et de tous les climats, durant le weekend du Chrono de Silly et du BXL Tour. Retour sur deux journées vélo vécues à 200 à l’heure, au point de faire un bond dans les saisons !
This is Silly
Samedi 18 juin, les hostilités débutent avec le contre-la-montre par équipe de Silly. Pour les 54 formations alignées au départ, l’enjeu est énorme. Le titre de champions de Belgique du chrono et le prestige de porter le maillot tricolore durant un an sur certaines classiques (contre-la-montre, BXL Tour, critériums…).
Le parcours de 39km est roulant, mais très technique avec pas moins de … 59 virages. Sur un tel tracé, la qualité du pilotage a une importance toute particulière. Mais c’est surtout la synchronisation du train collectif qui est déterminante. Car pour une fois, la clef du succès ne repose pas sur les épaules du leader. Mais bien sur celles de ses lieutenants et du coureur qui pourra assurer le meilleur … 5e temps. Dans ce contexte, une relance trop appuyée risquait de créer la cassure, tandis qu’un relais mal calibré pouvait dérailler tout l’équilibre du train.
Ladies First
À l’encontre de toute forme de galanterie, c’est le peloton « Ladies » qui s’est élancé en dernier de la brasserie de Silly. Et c’était loin d’être un cadeau ! En démarrant toutes après 12h, les girls sont les seules à expérimenter la vraie fournaise de Silly. 39km et presque autant de degrés affichés. Peu importe le résultat final, elle était déjà là la performance du jour !
Championnes en titre, les Lotto Soutard partent logiquement favorites. L’effectif est bien huilé et la règle des 5 (temps pris sur le 5e passage à l’arrivée) devrait permettre de placer une dream team à l’avant. Mais dans le peloton, d’autres écuries comptent également jouer la carte nationale à fond !
Parties en premières, les 8L du maillot bleue Van Belleghem donnent le ton. Avec un Tour des Vosges dans les jambes pour une grande partie de l’effectif, on sent que la forme est là. La meilleure formation féminine du moment (au classement par équipe) boucle le parcours en 1:21:02. Un résultat qui leur permettra de monter sur la 3e marche du podium. Un cran plus rapides, les WoW Cycling passent à quelques secondes de l’exploit et terminent 2e en réalisant la plus belle performance collective de son histoire (1:18:45). Pour 22 petites secondes de mieux, Lotto Soutard confirme son statut de favorites. Malgré un chrono beaucoup plus disputé que prévu, les Lottos sont Championnes de Belgique pour la deuxième année consécutive (1:18:23). Historique.
Grolélé, Grollala !
En Pro Tour, c’est la consécration pour la Grolla. Moqués depuis le début de saison pour leur manque criant de résultats malgré un statut d’armada ultra-compétitive, les Grolleux font taire tous les détracteurs en repartant de Silly avec les honneurs. Et de quelle manière ! Sous les ordres du métronome Jean Watt, ils bouclent le parcours en 56 minutes et 50 secondes. Une performance qui prend la forme d’une claque pour toutes les autres formations, reléguées à plus de deux minutes.
Pointée à … 2:20 de la Grolla, la K7 monte sur la deuxième marche. Un résultat satisfaisant pour les champions en titre qui sortaient de deux chronos très compliqués (Tour de Bourgogne et Tour des Vosges). Pour une poignée de secondes, Epilation First – Bon Secours complète le podium en signant le troisième temps à passer sous la barre de une heure (3e, 0:59:45). Pourtant, les esthéticiens se sont fait peur en voyant défiler le train Grolla (parti derrière eux) à quelques kilomètres de l’arrivée.
« Lorsqu’on a entendu le motard Grolla siffler dans notre dos en demandant de nous rabattre, moralement c’était très dur. Je me suis qu’en fait on était complètement à la ramasse. Alors que j’avais l’impression de pousser et qu’on était bien… Ce qui est sur, c’est qu’on avait déjà perdu le chrono.«
Laurent Warzée
Epilation First – Bon Secours
Conti Partiro
En Continental, où certaines formations sont parfois moins homogènes qu’en Pro Tour, le message était clair: Tu pars avec moi ! Personne ne doit lâcher la roue des leaders puisque l’objectif est de terminer à 5, et plus si affinités.
Sur cet exercice particulier, certains outsiders, pas encore couronnés cette saison, étaient cités parmi les candidats au titre: Betafence-Mathurin, Brussels Unchained, Sterke Ludos, Aloalto-Up to Rent ou encore Carolo Postal Service. Mais à l’arrivée, force est de constater que la hiérarchie continentale a été respectée.
Bien emmenées par leurs stars (tous dans le top 4 du maillot bleu), les trois formations en tête du classement par équipe se retrouve sur le podium du contre-la-montre à l’arrivée. Les GO font DUVEl’o d’Olivier Pigeolet (3e, 1:04:24) et la Nénu Cycling Team de Jérémy Chevalier (2e, 1:03:52) occupent les places d’honneur. Favori du jour, Camber-Krefël confirme sa domination sur le peloton en réalisant le doublé champion de Belgique individuel (G. Spoel, mars 2022) et collectif (Chrono de Silly) !
BXL Tour, la bataille de Water-l’eau
Lieux emblématique de notre histoire nationale, Waterloo c’est finalement un peu comme tartine et boterham. Peut-être parce que notre joli pays aime encore bien ça… la flotte. Et dans les deux langues ! Une affinité que les coureurs du peloton ont eu le loisir de déguster durant les 40km du BXL Tour. Une ambiance dantesque, éloignée de deux saisons et de 20 degrés des chaleurs de la veille à Silly.
Dans ce contexte sous tension, les consignes étaient claires au sein du peloton: you watch my back, I watch your back ! Pas de place au risque et aux comportements dangereux lorsqu’on déboule à une telle vitesse sous ce déluge. Dès les premiers mètres, la communication est régulière et précise. Les automatismes du peloton sont là, et les coureurs expérimentés pour les appliquer. Merci à eux.
Côté sportif, on a vu de belles choses. Du moins, pour qui savait plisser les yeux. Car il était difficile d’y voir clair à l’intérieur de l’autolaveuse BCF. Le sillage de chaque machine renvoyant en apesanteur les goutelettes à peine déposées sur les routes détrempées de la capitale. Un carwash collectif qui, après le débat brulant « assis ou debout dans la Moskestraat ? », anime le nouveau sujet chaud : « avec ou sans lunettes en peloton sous la pluie ? » (léger avantage pour les sans lunettes selon les derniers sondages).
Merckx’ci Eddy
Pour donner le départ en fanfare du BXL Tour, on pouvait compter sur l’enthousiasme de la plus grande personnalité sportive du royaume. Depuis la voiture ouvreuse, le cannibale ouvrait le bal de Bruxelles et fixait rendez-vous aux meilleurs coureurs du peloton pour le podium sous l’Atomium.
Une carotte qui a du en exciter certains puisque cela part fort dès le premier kilomètre. Le peloton passe devant les institutions européennes sans demander sa commission. Un coup de force qui opère déjà un premier tri et piège de nombreux favoris, mal placés sur la ligne de départ. Lorsqu’on relève la tête dans les tunnels, on fait les comptes dans un bruit de tonnerre. Qui est-là, qui n’est plus là ? Mais très vite, il faut se ressaisir. Dès la sortie, la pluie est de retour et il ne faut pas perdre le contact dans la relance. Ce bal du cyclisme va durer 40km, tandis qu’à l’avant les formations Bicyket, Smip-Café Bastoche et Delta Sabena mènent la danse alors qu’en queue de peloton une fanfare de coureurs jouent de l’accordéon.
À 5km de l’arrivée, les difficultés se succèdent. À Laeken, la sélection naturelle opère à nouveau dans la montée du palais japonais. Après la descente, le virage à 180 degrés sur des pavés plus glissant qu’un brise lame à la mer du Nord surprend et cause la chute de plusieurs coureurs. Le briefing des directeurs était pourtant clair: « il fallait être à l’avant à ce moment-là pour éviter les cassures » ! Pour les derniers coureurs dans le groupe de tête, la gagne se joue alors à la régulière, sur les pentes de la dernière ascension (1,4km à 3,8%).
Arnaud Qui ?
À l’arrivée, le suspense est encore total puisque plusieurs formations de sprinteurs sont parvenues à accrocher les puncheurs. Malheureusement pour la Sabena, le train qui devait emmener son F16 Henri Girboux (maillot vert du Tour des Vosges) sur la ligne d’arrivée chute dans le dernier virage et c’est toute l’aviation qui se retrouve au sol. Profitant de la confusion, les cadors s’échappent.
En Pro Tour, Paul Asselberghs (K7) pensait avoir fait le plus dur à 50 mètres de l’arrivée. Mais c’était sans compter sur une fusée Zafi Farhbar. Après une 3ème place sur les Routes Noires, Arnaud Hendrix décolle et signe son premier succès BCF ! Le podium est complété par Alexandre Jardon (Renowindow-White Night) qui, comme à son habitude, finit troisième. Net niet pour le Poulidor du peloton.
Trop souvent dans l’ombre du Champion de Belgique (Guillaume Spoel) et du maillot bleu (Paul Spoel), les autres tenors du peloton Continental espéraient mettre en difficulté les deux frères de la Camber-Krefël. Arrivés dans un mouchoir, c’est Jérémy Chevalier (Nénu Cycling Team) qui place en premier son attaque. Plus frais que ses opposants, il ne sera pas repris et remporte l’épreuve en devançant de quelques mètres le trio Spoel-Spoel-Pigeolet (GO font DUVEL’o). Les places d’honneur se jouent donc au sprint ! Dans cet exercice, Pigeolet fait parler sa puissance et jette son vélo pour devancer les frères Spoel. La troisième place est remportée par Paul, l’ainée, qui rappelle qu’en explosivité pure il est peut-être le plus solide de la fratrie.
Chez les femmes, Morgane de Halleux (Les Dérailleuses) était un cran au-dessus de la concurrence. Elle s’impose en solitaire avec 40 secondes d’avance sur sa poursuivante, la championne de Belgique Juliette Lucarain (Zinneukeuses). Les deux coureuses en profitent pour signer le meilleur temps féminin parmi les 5000 participants du BXL Tour. Proficiat. À la troisième place, on retrouve une habituée des podiums. La maillot bleu, Clarisse Van Belleghem (8L) confirme sa forme du moment en devançant son adversaire et maillot jaune du Tour, Julie de Troostembergh.
L’été sera chaud
Après l’avant-gout du contre-la-montre de Silly, on annonce des températures records cet été. Il va donc falloir sortir ses plus maillots. Pour certains, ceuxi-ci seront bleus, verts ou à pois rouges.
Côté bleu, pas de changement après le chrono et le BXL Tour, même si cela se resserre sérieusement chez les Ladies et en Continental. Paul Asselberghs, Paul Spoelbergh et Clarisse Van Belleghem conservent leur statut de leaders de la fédération.
Dans les classements distinctifs, Troostembergh (Dérailleuses, Ladies) et Thibault Melin (Duvel Cycling, Continental) réalisent une razzia en repartant chacun avec le maillot vert et le maillot à pois dans leur catégorie. Très concentrée sur le sujet, la performance tactique de la formation Duvel Cycling sur le chrono est à souligner puisqu’en laissant volontairement le général de côté, ils ont propulsé sur orbite leur leader Melin sur chaque segment du parcours. Fino.
En Pro Tour, RAS. Tout le monde garde son maillot. Même si les écarts sont minimes, William Kies restent bien accrocher aux pois rouges. Une tunique qu’il était parvenu à conserver grâce à sa deuxième place au sommet du trophée Michel Sabourin lors du Tour des Vosges (première ascension de la 4e étape). En empochant les 20 points de ce prix symbolique, il passait devant Quentin Jardon (Grolla) qui pointait 17 points derrière avant le chrono de Silly.
Effort, Vélo, Passion. Même combat
Comme lors de chaque classique, les beaux gestes et les moments héroïques se sont multipliés. Parmi ceux-ci, en voici trois qui méritaient bien le prix de combatif du week-end.
En Ladies, comment ne pas saluer la performance de Madelon Dewitte (8L) qui a bravé la chaleur et la douleur des jambes pour boucler le contre-la-montre de Silly. Très affectée par la canicule, elle rejoint la ligne d’arrivée à bout de force, et après la remise des prix. Mais elle l’a fait ! Elle est la combative du peloton Ladies et rapporte 60 précieux points bleus à sa formation.
Chez les continentaux, une légende circule au sujet d’un coureur Aloalto – Up to Rent. En plus d’avoir participer à la solide quatrième place de son équipe (1:05:05), Alexandre Cailleau se serait arrêté quelques instants sur les bords de route afin de prêter secours à une chienne en train de mettre au monde ses petits. Info ou intox ? Finalement, peu importe. Les légendes font parties de la magie du cyclisme. Celui qu’on surnomme Roukmoutte, est le combatif du jour en Continental.
En Pro Tour, la direction de course salue une performance collective. Souvent citée, mais encore jamais récompensée par le prix de la Combativité, la formation EF – Bon Secours tient son premier maillot rouge. Toujours à la pointe de l’innovation, les esthéticiens se sont offert un stand d’échauffement sur rouleau en négociant un accès à l’électricité auprès d’un voisin de la brasserie. Parmi les coureurs de cette écurie, Bonneville souligne également le dévouement de Thomas Theys. Après une première épilation partielle des mollets en avril, l’Ours de Néanderthal (nom de son village dans le Hainaut) a franchi un nouveau cap. Par amour du collectif, Thys oublie la souffrance et repasse chez le coiffeur. Mis à part une vilaine réaction cutanée, il ne lui reste plus rien sous le cuissard. Bravo monsieur !
Sous les pavés, la plage
Après ce weekend d’exception, place au prochain rendez-vous de la saison. Le Grand Prix OMER. qui se déroule du 1er au 31 juillet (participation libre tout le mois). Une classique monumentale sur les bergs du Tour des Flandres, avec énormément de points à distribuer.
Alors cet été, entre les moments de détente sur la plage, prenez quelques instants pour découvrir les murs pavés les plus mythiques du cyclisme mondial.
Vive le vélo. Vive les grandes vacances.